Selon des chiffres récents, de nombreuses personnes issues de la migration ou ayant fui leur pays intègrent avec succès la formation professionnelle initiale grâce au préapprentissage d’intégration. Entretien avec Jasmina El Mohib, responsable de la mise en œuvre du préapprentissage d’intégration dans le canton de Berne.
Rolf Marti
Pourquoi le canton de Berne participe-t-il au programme national intitulé « préapprentissage d’intégration » mais désigne cette offre simplement comme un « préapprentissage » ?
Nous avons introduit un nouveau plan d’études cadre pour le préapprentissage à la rentrée scolaire 2022. En lieu et place des trois offres destinées à des publics cibles différents, à savoir le préapprentissage standard, le préapprentissage d’intégration et le préapprentissage 25+, un nouveau modèle homogène a vu le jour, au sein duquel nous appliquons les exigences fédérales relatives au préapprentissage d’intégration.
Quels sont les avantages de cette nouvelle approche ?
Nous pouvons former les élèves de manière plus ciblée. Avant, ils étaient orientés vers l’une des trois offres sur la base de certains critères et suivaient la formation correspondante. Aujourd’hui, nous analysons les besoins individuels de chaque élève de préapprentissage et définissons les mesures de soutien nécessaires. En outre, l’enseignement à l’école professionnelle est spécifique au domaine professionnel choisi. Le nouveau plan d’études présente encore d’autres avantages : désormais, un préapprentissage est possible dans presque tous les domaines professionnels, notamment aussi dans ceux qui intéressent les femmes. C’est pourquoi nous comptons aujourd’hui autant de femmes que d’hommes en préapprentissage, ce qui n’était pas le cas avec l’ancien modèle du préapprentissage d’intégration. Les entreprises, pour leur part, ont nettement moins de travail administratif.
Quels étaient les objectifs du préapprentissage d’intégration lors de son lancement en 2018 ?
La Confédération souhaite encourager l’intégration des personnes reconnues comme réfugiées et des personnes admises à titre provisoire dans le monde du travail et dans la société et ainsi réduire leur nécessité de recourir à l’aide sociale. Depuis 2021, les ressortissantes et ressortissants de l’UE, de l’AELE et d’États tiers qui ne sont pas titulaires d’un diplôme de fin de scolarité obligatoire ont accès au préapprentissage d’intégration. Il en va de même pour les personnes bénéficiant du statut de protection S depuis 2022.
Quelles sont les conditions requises pour s’inscrire à un préapprentissage d’intégration ?
La personne intéressée doit conclure un contrat de préapprentissage avec une entreprise et avoir un niveau linguistique A2 au moins dans la langue d’enseignement (voir « liens »).
Comment se passe l’acquisition des connaissances linguistiques, qui est un aspect clé du préapprentissage d’intégration ?
Dans le cadre de l’enseignement des langues, les élèves comblent de façon ciblée leurs lacunes linguistiques basiques. Au début du deuxième semestre, leur niveau est évalué. Si nécessaire et avec l’accord de leur entreprise de préapprentissage, ils peuvent fréquenter un cours de langue intensif d’une demi-journée. D’ailleurs, le modèle homogène a un effet positif dans ce domaine : les classes n’étant plus composées en fonction des groupes cibles, la mixité linguistique est plus grande, ce qui encourage l’acquisition des compétences linguistiques.
Les élèves bénéficient-ils d’un coaching ?
Oui, ils sont accompagnés de coaches au sein de l’école professionnelle, notamment pour les questions relevant du choix professionnel, pour le relevé des progrès et pour l’encadrement lors du passage à la formation professionnelle initiale. Les problèmes, qu’ils soient d’ordre professionnel, privé ou relatifs à la santé, font aussi l’objet de discussions. Les interventions des coaches sont toutefois limitées : ils écoutent, rassemblent et transmettent l’information et aident les élèves à prendre contact avec des services spécialisés et des futures entreprises formatrices.
Pour s’inscrire à un préapprentissage, il faut un contrat avec une entreprise formatrice. Les entreprises sont-elles disposées à former des personnes issues de la migration ou ayant fui leur pays ?
Oui. Près de la moitié des élèves de préapprentissage n’a pas grandi en Suisse ou n’a pas réalisé sa scolarité en Suisse. L’engagement dont font preuve les entreprises est très réjouissant.
Cet été, une évaluation nationale du préapprentissage d’intégration a été publiée (voir encadré). Quels sont les principales conclusions concernant le canton de Berne ?
Lors de l’année scolaire 2022-2023, 86 % des élèves en préapprentissage ont achevé leur formation et 76 % sont passés à la formation professionnelle initiale. En chiffres absolus, cela signifie que sur les 117 élèves qui ont terminé leur préapprentissage, 54 ont débuté une formation professionnelle initiale sanctionnée d’une attestation fédérale de formation professionnelle (AFP) et 35 ont entamé une formation professionnelle initiale sanctionnée d’un certificat fédéral de capacité (CFC). Si ces résultats sont si bons, c’est aussi parce que le canton de Berne dispose de formations efficaces en amont, comme l’année scolaire de préparation professionnelle Pratique et intégration, qui est un tremplin important pour le préapprentissage.
Comment une entreprise qui souhaite proposer un préapprentissage doit-elle procéder ?
Pour former des apprenties et apprentis, une entreprise doit détenir une autorisation de former. Lorsqu’elle trouve une personne correspondant au profil recherché, elle peut soumettre un contrat de préapprentissage via le portail des places d’apprentissage du canton ou via notre site Internet. Les entreprises qui ne disposent pas d’une autorisation de former doivent contacter les conseillères et conseillers en formation (voir liens ci-dessous). Autre information : les contrats de préapprentissage pour l’année scolaire actuelle peuvent être conclus jusqu’à fin janvier 2025.
Préapprentissage dans le canton de Berne
Bourse des places d’apprentissage (portail SIPA)
Portail des entreprises formatrices
Formulaire d’inscription au préapprentissage
Niveau linguistique (cadre européen de référence pour les langues)
Évaluation nationale du préapprentissage d’intégration
Dans le cadre d’une évaluation du projet pilote « préapprentissage d’intégration », la Haute école pédagogique germanophone de Berne (PHBern) a interrogé plus de 2700 élèves, formatrices et formateurs, enseignantes et enseignants, coaches et interlocutrices et interlocuteurs des 18 cantons participants. Les élèves interrogés (73 % d’hommes) avaient en moyenne 25 ans et venaient pour la plupart d’Érythrée, d’Afghanistan ou de Syrie. Ils se sont dits très satisfaits de la formation en entreprise et dans l’école professionnelle. Parmi les personnes interrogées, plus d’une sur cinq a achevé avec succès son préapprentissage et environ 70 % ont ensuite intégré la formation professionnelle initiale (AFP ou CFC).
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